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Majdoline Wahbi
30.06.2021

Le mapping des startups Agritech en France — édition 2021

Voici l'édition 2021 de notre mapping annuel des startups Agritech en France.

Pour la première fois depuis que nous publions notre mapping annuel des startups agritech, nous ne le faisons pas à l’occasion du (mythique) Salon de l’Agriculture. D’abord décalé au printemps, puis annulé, il est malheureusement à l’image de l’année compliquée que l’agriculture française a traversé.

Les agriculteurs ont fait face à de grandes difficultés en 2020 et en ce début d’année 2021. Difficultés liées à la crise sanitaire, bien sûr, avec ses effets sur la logistique, la main d’œuvre ou encore la santé mentale des agriculteurs, mais aussi à des drames climatiques et environnementaux. Le récent gel des cultures aura des conséquences directes sur les acteurs de la filière et sur le prix de ce que l’on mettra dans nos assiettes cet été. On peut ajouter à ce bilan les difficultés sociales et culturelles causées par l’antagonisme entre agriculteurs et activistes écologiques sur l’épineuse question du glyphosate.

Parmi les seules éclaircies dans cette météo morose, quelques levées de fonds records de startups agritech confirment l’intérêt de la French Tech pour le secteur. Ce sont près de 500 millions d’euros qui ont été levés par les startups agritech françaises en 2020, auprès d’investisseurs français et étrangers. Essentiellement grâce à la seule levée de Ynsect. Mais cela hisse tout de même la France au deuxième rang européen en termes de capital levé, derrière le Royaume-Uni (dont les startups ont tout de même levé plus du double) !

L’année écoulée a été jalonnée en France par quelques levées de fonds records dans le secteur :

  • Ynsect, spécialisée dans l’élevage d’insectes, a recolté 372 millions d’euros pour financer son usine dans les Hauts-de France
  • Dans le domaine de l’agriculture verticale et dans les sillons de Agricool, Jungle France a levé 42 millions d’euros
  • Deux autres levées significatives de 10 millions d’euros ont été menées par Vitibot, pour son robot viticole et Nextprotein, pour le développement de farines à base d’insectes
  • A noter également, l’intérêt croissant des fonds généralistes sur la filière. Daphni a par exemple décidé d’accompagner Hub.cycle, acteur de la revalorisation des déchets organiques et agricoles tandis que XAnge a misé sur la startup biotech Core Biogenesis.

En comparant notre version précédente de ce mapping, publiée en Février 2020, nous continuons d’observer certaines tendances sur le secteur:

L’agriculture, une filière toujours attractive pour les entrepreneurs

Une croissance du nombre de startups (380 sociétés, soit 40% de plus que l’année dernière), sur des thématiques couvrant toujours l’ensemble de la chaîne de valeur agricole; de la gestion des ressources jusqu’à la valorisation des invendus auprès des consommateurs finaux, en passant par des productions industrielles ultra-innovantes.

Le circuit-court continue de se développer, porté par des entreprises comme La Ruche qui dit Oui, Demande à Gaston ou encore Omie, dont la mission commune est de faciliter l’accès à une alimentation locale de qualité. Sur la question du gâchis alimentaire, on commence à observer dans l’agriculture ce qui s’était déjà produit dans la grande distribution grâce à des équipes comme celles de Too good to go et PhenixGrégoire Carlier a ainsi cofondé Hors Normes en 2020, qui s’emploie à vendre les invendus des agriculteurs sous forme d’abonnement. Ce modèle s’avère déjà couronné de succès aux Etats-Unis, puisque la startup Misfits Market, dont Hors Normes s’inspire, vient de boucler un tour de table de 200 millions de dollars.

Les avancées technologiques dans les domaines comme la méthanisation et les biogaz permettent de mettre en place des systèmes de revalorisation énergétique directement dans les domaines agricoles. C’est la mission que relève Datafarm, qui installe et opère des centres de données neutres en carbone alimentés… à la bouse de vaches. Outre l’impact écologique du procédé, cela permet à des agriculteurs de renforcer leur modèle économique en ajoutant une ligne supplémentaire à leurs revenus.

Les substituts de viande (et même de poisson) à base de protéines végétales sont de plus en plus visibles dans nos supermarchés, portés par des marques montantes comme Les Nouveaux Fermiers, qui mettent à l’échelle leur processus industriel et leur modèle de distribution à une vitesse impressionnante. En B2B, des jeunes pousses comme Umiami développent des procédés de fabrication de pointe, plus évolués que les processus habituels d’extrusion sèche et humide, lesquels permettent d’offrir un très haut niveau de qualité nutritionnelle et gustative.

Dans les laboratoires, la viande de synthèse, fabriquée à partir de cellules souches et non plus d’animaux vivants, se développe à vive allure et représente un espoir de plus en plus crédible face à l’élevage intensif. Il reste en revanche de nombreux verrous technologiques et industriels pour parvenir à une démocratisation de ces produits et espérer les retrouver dans nos assiettes. Les molécules de croissances, indispensables à la conception de viandes de synthèse,sont malheureusement encore trop coûteuses pour permettre leur industrialisation de masse. C’est le problème que tente de résoudre Core Biogenesis, à travers un processus de bioproduction innovant.

Si certaines tendances se sont renforcées cette année, on note néanmoins deux évolutions majeures par rapport à notre mapping de 2020, l’une positive et l’autre plus contrastée:

L’année dernière, nous parlions de l’agridata en tant que priorité stratégique pour la filière et émettions des réserves quant à la volonté des diverses parties prenantes de mutualiser les données et de s’accorder sur des standards. Nos réserves ont malheureusement tourné aux mauvais présages. La catégorie agridata a connu peu de succès significatifs ces derniers mois, et la filière peine toujours à se digitaliser. Fabrizio Delage, cofondateur de Valeur-Tech, un service indépendant de conseil et de solutions agritech, explique à ce sujet que “le secteur n’est pas encore mature”. Nous sommes en effet encore loin de la standardisation des open-API, qui ont permis à des industries comme la finance de se digitaliser profondément. Il ajoute que “tous les acteurs du secteur parlent de standardisation des données et des protocoles, mais que c’est encore loin d’être une réalité”, car “les agriculteurs doivent être formés aux technologies et à la gestion des données. Il faut qu’ils soient sensibilisés à la question du partage de la donnée”.

Seule exception à la règle dans le secteur, Agdatahub a été lauréate d’un appel à projet opéré par la BPI au compte de la filière. La startup française a perçu plus de 3 millions d’euros pour continuer de développer sa plateforme de valorisation et d’échange de la donnée agricole.

Finissons sur une note positive: il semble que l’agritech soit traversée par une véritable révolution deeptech, et tout particulièrement biotech. Elle se reflète dans le succès de sociétés fondées sur des technologies de rupture dans les domaines des sciences de la vie et de la terre (chimie et biologie tout particulièrement).

On avait commencé à entr’apercevoir ce phénomène dès 2019, année des levées de fonds de plusieurs dizaines de millions d’euros de M2I LifeSciences et DNA Script, positionnées sur le traitement biologique de cultures, de Microphyt, pour ses produits nutritionnels à base d’algues, ou encore de Afyren, qui produit des micro-organismes et autre solutions biotechnologiques pour l’agriculture. Cette tendance commence à se confirmer de manière très nette dans nos propres données. Cette année, notre liste se compose de plus de 8% de startups biotech, ce qui nous a d’ailleurs mené à lui dédier une sous-catégorie propre pour la première fois.

Ces constats, pour l’essentiel encourageants, nous amènent à penser que l’AgriTech française gagne en maturité par l’ambition des enjeux qu’elle adresse et la qualité des entrepreneurs. Tout nous laisse donc penser que nous verrons de plus en plus de startups dans le lignée de l’épatante Ynsect dans les prochaines années.

A l’année prochaine!

Majdoline Wahbi
Associate @XAnge

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NB: Avec plus de 350 startups agritech identifiées nous avons fait le choix de présenter les principales catégories dans lesquelles XAnge investit. Ce mapping n’est donc pas exhaustif. Si vous avez des suggestions de sociétés ou des demandes de modifications, n’hésitez pas à nous en informer sur bit.ly/mapping-agritech

Merci à Fabrizio Delage et Maxime Sebti pour le partage de leurs expériences d’entrepreneurs dans l’agritech. Merci également à l’équipe de XAnge pour l’aide à la conception et relecture de ce mapping, et tout particulièrement à Astrid Moullé-Berteaux et Estelle Van Praet.

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